mercredi 8 décembre 2021

Anatomie de la mobilité intergénérationnelle du revenu en France

En s’appuyant sur les données administratives, Gustave Kenedi et Louis Sirugue (2021) ont fourni de nouvelles estimations de la mobilité intergénérationnelle de revenu en France pour les personnes nées dans les années 1970.

Au niveau national, ils confirment que la France se caractérise par une persistance du revenu relativement forte d’une génération à l’autre par rapport aux autres pays développés, surtout relativement aux pays scandinaves. Ils aboutissent à une estimation de l’élasticité intergénérationnelle du revenu de 0,515 : un gain de revenu d’un certain montant pour les parents se traduit pour l’enfant une fois adulte par un gain de revenu d'un montant moitié moindre à celui de ses parents.

Graphique 1. Matrices de transition entre quintiles de revenus en France et aux Etats-Unis

La persistance intergénérationnelle est particulièrement forte aux extrémités de la répartition des revenus des parents : en France, ceux dont les parents étaient parmi les 20 % les moins rémunérés ont une probabilité de 10,1 % de faire partie des 20 % les plus rémunérés une fois adultes ; ceux dont les parents étaient parmi les 20 % les plus rémunérés ont 39,1 % de chances de faire partie des 20 % les plus rémunérés une fois adultes (cf. graphique 1).

Graphique 2a. Degré d'élasticité intergénérationnelle du revenu selon le département

Au niveau local, Kenedi et Sirugue observent de forts écarts en termes de mobilité intergénérationnelle d’un département à l’autre de la France métropolitaine : celle-ci est plus élevée à l’ouest et particulièrement faible au nord et au sud (cf. graphiques 2a et 2b). 

Graphique 2b. Degré de mobilité absolue ascendante du revenu selon le département

En outre, Kenedi et Sirugue constatent que la mobilité absolue ascendante est positivement corrélée avec la densité démographique et la part des diplômés du lycée dans la population, mais négativement corrélée avec le niveau des inégalités de revenu et le taux de chômage. Ils observent une forte relation entre le niveau d’inégalités de revenu et la mobilité intergénérationnelle, évoquant la « courbe de Gatsby » (Corak, 2013) : la mobilité intergénérationnelle apparaît d’autant plus forte que les inégalités de revenu sont faibles. 

 

Références

CORAK, Miles (2013), « Income inequality, equality of opportunity, and intergenerational mobility », Journal of Economic Perspectives, vol. 27, n° 3. 

KENEDI, Gustave, & Louis SIRUGUE (2021), « The anatomy of intergenerational income mobility in France and its spatial variations », Paris School of Economics, working paper, n° 2021-59.