Ces dernières décennies ont été marquée par une tendance des clubs de football européens à creuser leurs pertes et à s’endetter. Loin d’être de simples entreprises, les clubs ne semblent guère chercher à maximiser leurs profits, peut-être parce que leurs dirigeants sont également en quête de prestige ; le cadre même de la compétition favorise peut-être propice à la mauvaise gestion, etc. Dans tous les cas, afin de mettre un terme à cette spiral d’endettement et veiller à la stabilité financière des clubs, l’UEFA a mis en place au début des années 2010 le fair play financier, un ensemble de règles empêchant les clubs qui se qualifient pour les compétitions de l’UEFA de dépenser davantage qu’ils n’ont obtenu de recettes.
A priori, ce dispositif ne met pas un terme aux inégalités des chances entre les clubs : les clubs les plus prestigieux peuvent toujours davantage dépenser que les autres dans la mesure où ils gagnent plus de recettes, ce qui leur permet de recruter les joueurs les plus performants et de se maintenir en haut des classements. Plusieurs études ont cherché à déterminer l’impact du fair play financier sur l’équilibre concurrentiel au sein des ligues européennes [Franck, 2014 ; Peeters et Szymanski, 2014 ; Freestone et Manoli, 2017 ; Birkhäuser et alii, 2019 ; Plumley et alii, 2019 ; Garcia-del-Barrio et Rossi, 2020]. Plusieurs d’entre elles suggèrent que l’introduction du fair play financier est susceptible d’aggraver les déséquilibres concurrentiels, par exemple en renforçant les barrières à l’entrée de nouveaux investisseurs financiers. Il n’est en outre pas clair que le dispositif améliore la situation financière des clubs européens [Ahtiainen et Jarva, 2020].
Pedro Garcia-del-Barrio et Pablo Agnese (2021) ont cherché à évaluer le degré de conformité des clubs de football européens aux règles de fair play financier de l’UEFA et les effets de cette plus ou moins grande conformité sur les performances de ces clubs. Pour cela, ils ont étudié les données relatives à la première division de quatre lignes domestiques, en l’occurrence la Premier League au Royaume-Uni, la Liga en Espagne, la Serie A en Italie et la Ligue 1 en France, pour les saisons allant de 2009-2010 à 2015-2016. En examinant le comportement de chacune de ces quatre ligues au prisme d’une équation de productivité, Garcia-del-Barrio et Agnese constatent que plus le ratio salaire sur revenu est faible, plus la performance du club tend à être bonne ; en outre, il apparaît qu’une baisse de ce ratio de 10 % se traduit par une hausse de 7 % et de 3 % des chances de qualifications pour la Ligue des Champions et la Ligue Europa. Leur analyse suggère qu’une plus grande responsabilité financière se traduit par de meilleures performances sportives et de meilleures chances de se qualifier pour la Ligue des Champions et la Ligue Europa.
Références