Il y a un peu plus de deux ans désormais, le commerce international s’est soudainement effondré avec la première vague épidémique de la Covid-19 et l’adoption de confinements à travers le monde. Par exemple, les exportations françaises ont chuté de 78 % et les importations françaises de 70 % sur un an. Avec les déconfinements, les échanges internationaux ont vite rebondi, retrouvant leurs niveaux prépandémiques à la fin de l’année.
L’impact de la crise sanitaire sur les échanges commerciaux des firmes françaises a déjà fait l’objet de plusieurs travaux. Raphael Lafrogne-Joussier et alii (2021) se sont focalisés sur l’impact du confinement mis en place par le gouvernement chinois sur l’activité commerciale des entreprises françaises. Ils ont constaté que celles qui dépendaient étroitement des intrants importés de Chine ont été les plus affectées. De leur côté, Jean-Charles Bricongne et alii (2021) ont noté que les plus grosses entreprises françaises ont été affectées de façon disproportionnée par le choc sanitaire.
Dans une nouvelle étude du FMI, Mariya Brussevich, Chris Papageorgiou et Pauline Wibaux (2022) ont analysé des données granulaires relatives aux firmes françaises pour observer la propagation du choc pandémique le long des chaînes de valeur.
Ils constatent que la sévérité des confinements des partenaires à l’échange a eu plus grand impact que le nombre de morts qu'ils aient pu enregistrer sur les échanges commerciaux réalisés par les entreprises françaises, sauf dans le cas du commerce avec les pays à faible revenu. Le choc pandémique s’est rapidement propagé le long des chaînes de valeur. Les biens situés le plus en aval des chaînes de valeur, c’est-à-dire les plus proches du consommateur final, ont été les plus affectés. Le choc a été temporaire, se dissipant rapidement au cours du troisième trimestre de l’année 2020. Ces premiers résultats suggèrent à Brussevich et à ses coauteurs que l’effondrement, puis le rebond, des échanges commerciaux réalisés par les entreprises françaises ont été avant tout tirés par la demande.
Il apparaît également que l’ajustement aux premiers temps de la pandémie est, comme lors de la crise financière mondiale, davantage passé par la marge intensive que par la marge extensive : les entreprises françaises ont essentiellement réagi aux confinements et à la propagation du virus en réduisant leurs volumes échangés plutôt qu’en sortant des marchés d’importations ou d’exportations. Par contre, l’ajustement via la marge extensive a joué un rôle plus important dans le cas du commerce avec les pays en développement : les firmes françaises échangeant avec ces derniers risquaient davantage de tout simplement cesser d’échanger avec eux.
Brussevich et ses coauteurs notent aussi que les entreprises ont eu tendance à être d’autant plus épargnées par le choc qu’elles étaient automatisées, disposaient de stocks et étaient âgées ; les entreprises de taille moyenne ont été moins affectées que les entreprises de petite ou de grande taille. A l’inverse, la dépendance vis-à-vis du transport aérien pour transporter les biens a eu tendance à amplifier les effets du choc.
De tels constats amènent en définitive Brussevich et ses coauteurs à douter que l’épidémie de Covid-19 ait entraîné une phase de démondialisation commerciale.
Références