Au printemps 2020, la pandémie de Covid-19 et les confinements adoptés pour en freiner la propagation ont entraîné l’une des plus puissantes contractions de l’activité économique que le monde ait connues. Les gouvernements ont immédiatement adopté des mesures pour en atténuer les effets et permettre à l’économie de rebondir rapidement lorsqu’ils retireraient les mesures de confinement. Les plans de soutien budgétaire que les gouvernements ont adopté n’ont pas eu la même ampleur d’un pays à l’autre ; ils ont généralement été plus importants dans les pays développés que dans les pays en développement, les premiers disposant d’une plus grande marge de manœuvre budgétaire que les seconds. En outre, les plans de soutien n’ont pas forcément ciblé les mêmes agents : certaines mesures concernaient les ménages, d’autres les entreprises. Dans le premier cas, il s’agissait par exemple de s’assurer à ce que les ménages continuent de subvenir à leurs besoins et soient moins tentés de chercher à épargner par précaution. Dans le second cas, il s’agissait d’éviter à ce que les entreprises fassent immédiatement faillite.
En soutenant la demande, alors que l’offre restait durablement contrainte, les plans de relance contribuent à expliquer l’emballement de l’inflation observée ces deux dernières années. François de Soyres et alii (2022) constatent effectivement que les mesures de soutien budgétaire ont stimulé la demande de biens de consommation, alors que la production industrielle restait atone ; le déséquilibre résultant s’est ajusté via les prix. En étudiant les effets que la hausse du revenu réel disponible associée aux mesures de transferts a pu avoir sur l’inflation dans les pays développés, Oscar Jordà et Fernanda Nechio (2022) ont constaté que les pays qui ont adopté les mesures les plus agressives aux premiers temps de la pandémie ont connu une hausse disproportionnée de leur taux d’inflation en 2021.
Focalisés sur les premiers temps de la pandémie, en l’occurrence sur la période allant de début 2020 au milieu de l’année 2021, Galina Hale, John Leer et Fernanda Nechio (2023) ont étudié les effets que les plans de soutien budgétaire adoptés dans dix pays, incluant aussi bien des pays développés que des pays émergents, ont pu avoir sur l’inflation. En l’occurrence ils ont cherché à savoir si les effets des mesures budgétaires sur l’inflation dépendaient de la catégorie de leurs bénéficiaires. Dans la mesure où les indicateurs conventionnels de l’activité économique ont été perturbés aux premiers temps de la pandémie, Hale et ses coauteurs se sont appuyés sur les données relatives au moral des consommateurs pour jauger l’état de l’économie réelle. En outre, ils ont notamment contrôlé la sévérité de la crise sanitaire, l’ampleur des confinements et les changements de politique monétaire.
Hale et ses coauteurs constatent que les mesures de soutien ont eu tendance à alimenter l’inflation dès les premiers temps de la pandémie. Les effets inflationnistes des mesures budgétaires se sont manifestés cinq semaines après leur annonce et ils ont atteint leur maximum au bout de douze semaines. En l’occurrence, l’annonce d’un soutien budgétaire équivalent à 10 % du PIB a été associée à une hausse de 0,40 point de pourcentage du taux d’inflation trois mois après. En outre, ces derniers ont été plus forts dans les environnements où le moral des consommateurs s’améliorait : les mesures budgétaires ont alors été associées à une hausse de 0,60 point de pourcentage du taux d’inflation. Enfin, il apparaît que ce sont surtout les mesures destinées aux ménages, non celles destinées aux entreprises, qui ont eu des effets inflationnistes.
Références