mercredi 22 juin 2022

Ce que les confinements ont fait au commerce international

Les échanges commerciaux se sont fortement contractés au début de la pandémie de Covid-19, en l'occurrence de plus de 15 % au niveau agrégé (cf. graphique 1). Celle-ci a provoqué à la fois un choc d’offre et un choc de demande négatifs. Du côté de la demande, la contraction de l’activité économique provoquée par les mesures de restrictions sanitaires et les comportements de distanciation physique ont entraîné une baisse des importations. Du côté de l’offre, la fermeture des établissements et les difficultés d’approvisionnement ont entraîné une contraction des exportations, aggravant les difficultés d’approvisionnement dans les pays partenaires à l’échange.

Pour autant, le rebond des échanges, notamment dans le sillage des déconfinements, a été rapide, plus rapide que ce que beaucoup avaient anticipé et plus rapide que ce qui avait été observé lors des précédentes récessions mondiales (cf. graphique 1). En outre, le rebond des échanges se singularise par l'asymétrie de sa composition : les importations de biens ont connu un fort rebond, mais pas les importations de services (cf. graphique 2).

Afin d’éclairer ces divers constats, Shekhar Aiyar, Davide Malacrino, Adil Mohommad et Andrea Presbitero (2022) ont utilisé les données relatives aux échanges bilatéraux de biens. Ils notent que si un modèle de demande standard explique plutôt bien que la croissance passée des importations de biens et services, il prédit mal le comportement des échanges durant l’année 2020. En l’occurrence, les importations de biens ont chuté bien moins et les importations de services bien plus que ce qu’un tel modèle amène à prédire, ce qui confirme que d’autres facteurs que ceux du côté de la demande ont joué un rôle crucial cette année-là.

En poursuivant leur analyse, Aiyar et ses coauteurs notent que la chute des importations de biens dans un pays donné durant le premier semestre 2020 a été d’autant plus forte que les mesures de confinement adoptées par ses partenaires à l’échange étaient sévères. Les effets de débordement internationaux des confinements ont été importants, mais temporaires et concentrés sur les premiers temps de la pandémie. En réalisant une comparaison avec un contrefactuel sans confinement, Aiyar et ses coauteurs concluent que les confinements des partenaires à l’échange pourraient expliquer jusqu’à 60 % de la baisse des importations observée au cours des cinq premiers mois de l’année 2020.

D’autres facteurs ont influencé l’ampleur des effets de débordement. Ces derniers ont été d’autant plus forts pour les pays que ces derniers présentaient une faible marge de manœuvre budgétaire pour atténuer les effets de la pandémie et une moindre capacité à recourir au télétravail. Ils ont également été plus intenses dans les secteurs recourant le plus aux chaînes de valeur internationales, et ce d’autant plus encore si ces secteurs sont situé en aval des chaînes de valeur.

Enfin, Aiyar et ses coauteurs confirment que la pandémie de Covid-19 a été marquée par une forte réorientation de la demande des services vers les biens. Autrement dit, les mesures de confinement domestiques semblent avoir stimulé la demande de biens étrangers.


Références

AIYAR, Shekhar, Davide MALACRINO, Adil MOHOMMAD & Andrea PRESBITERO (2022), « International trade spillovers from domestic COVID-19 lockdowns », FMI, working paper, n° 22/120.

BERTHOU, Antoine, & Sebastian STUMPNER (2021), « L’impact des confinements sur le commerce international », Banque de France, Bloc-notes éco, billet n° 223.