samedi 2 octobre 2021

Le rôle de la demande dans l’effondrement des échanges lors de la pandémie

Le commerce mondial s'est brutalement effondré durant la crise financière mondiale en 2009 et durant la phase la plus aigue de la crise du Covid-19 l’année dernière. Durant la crise financière mondiale, le volume combiné du PIB des pays de l’OCDE s’est contracté d’environ 5 % et le volume des importations de biens et services de 17 % entre le pic et le creux ; lors de la crise sanitaire, ces chiffres ont été respectivement de 12 % et 20 %. En termes de magnitude, la chute des échanges a été assez similaire lors des deux épisodes. Relativement à la chute du PIB, l’effondrement des échanges lors de la pandémie a été moindre que celui observé en 2009. 

Heli Simola (2021) a étudié le rôle de la demande lors de l’effondrement des échanges, puis lors de leur subséquente reprise, au cours de ces deux épisodes. Pour cela, elle a étudié l’évolution des importations dans 40 pays développés et émergents au cours de la période allant du premier trimestre 1995 au quatrième trimestre 2020. Son analyse montre que la demande a joué un rôle important derrière l’effondrement du commerce lors des deux crises et en l’occurrence plus important lors de la pandémie que lors de la crise financière. Elle ne décèle toutefois pas d’éléments empiriques suggérant que l’élasticité de la demande se soit affaiblie. Lorsqu’elle ajuste la demande à l’intensité en importations, elle note que les variations de la demande expliquent assez bien la contraction des importations au deuxième trimestre 2020. L’importance des facteurs du côté de l’offre a été plus réduite lors de la pandémie que lors de la crise financière. La contribution des facteurs de la demande a été légèrement plus forte dans le cas des pays émergents que dans celui des pays développés ; la contribution des composantes de la demande domestique, en particulier de la consommation, a été plus élevée (et en conséquence celle de la demande extérieure plus faible) dans les premiers que dans les seconds.

Simola a ensuite observé le rôle des composantes de la demande lors des deux contractions des échanges et relevé plusieurs différences entre les deux épisodes. En 2009, l’effondrement des importations a été tiré par l’investissement dans la majorité des pays de l’échantillon observé. En 2020, c’est avant tout la consommation qui a contribué au déclin des importations dans plusieurs pays. Cette différence s’est également reflétée du côté productif de l’économie : l’effondrement du commerce lors de la pandémie a bien davantage touché le secteur des services que celui observé lors de la crise financière. Cela peut contribuer à expliquer pourquoi la contraction des échanges a été moindre lors de la pandémie que lors de la crise financière. En effet, le tertiaire représente un part importante du PIB dans plusieurs pays, or il est typiquement moins intense en importations que l'industrie manufacturière.

Contributions relatives moyennes des composantes de la demande lors de la chute des importations (en %)

La reprise des échanges dans le sillage de la crise financière mondiale a été lente et elle a été particulièrement tirée par le rebond de la demande domestique. La reprise post-pandémique du commerce a été rapide et tirée avant tout par les exportations, du moins dans le cas des pays développés : le niveau des échanges pré-pandémique a été quasiment retrouvé à la fin de l’année 2020. Ces constats suggèrent que le déploiement rapide de mesures de soutien dans les pays développés l’année dernière ont non seulement stimulé la production domestique, mais aussi par ce biais la demande extérieure, via  le réseau mondial de production. Ils amènent également à souligner l’importance de réfréner les politiques protectionnistes pour stimuler la reprise de l’économie mondiale. 

 

Référence

SIMOLA, Heli (2021), « Trade collapse during the covid-19 crisis and the role of demand composition », BOFIT, discussion paper, n° 12.