Les médias évoquent désormais régulièrement la notion d’éco-anxiété. Certains développent notamment l’idée que les angoisses écologiques puissent remettre en cause chez les plus jeunes générations l’envie d’avoir des enfants, par exemple par souci de contribuer le moins possible aux dégradations environnementales ou par inquiétude des répercussions de ces dernières sur le bien-être des générations futures.
Des travaux scientifiques, comme ceux de Sabrina Helm et alii (2021) et de Schneider-Mayerson (2021), ont suggéré qu’il pouvait effectivement y avoir un lien entre les inquiétudes environnementales et le désir de ne pas procréer. Par exemple, l’enquête réalisée par Schneider-Mayerson et Ling (2021) montrait qu’une part significative des jeunes Américains s’inquiètent, d’une part, de l’empreinte écologique de la mise au monde d’un enfant et, d’autre part, du bien-être des générations futures, celles-là mêmes qui seront confrontées aux manifestations les plus visibles et destructrices du changement climatique. Cela dit, ces travaux ne mettent à pas à jour les effets des angoisses environnementales sur les choix effectifs en matière de procréation.
Dans une nouvelle étude, Ben Lockwood, Nattavudh Powdthavee et Andrew Oswald (2022) ont cherché à voir si les inquiétudes relatives à l’environnement affectaient effectivement les comportements de procréation. Pour cela, ils se sont appuyés sur une enquête qui a suivi sur plusieurs années au Royaume-Uni un échantillon aléatoire de milliers d’hommes et de femmes n’ayant initialement pas d’enfants.
Il apparaît que les individus qui présentaient le mode de vie le plus soucieux de l’écologie se sont montrés ultérieurement moins susceptibles d’avoir des enfants. Cette corrélation pourrait toutefois s’expliquer par un large éventail de variables confondantes, par exemple le niveau d’études ou le niveau d’optimisme : les personnes très diplômées et les plus pessimistes peuvent être, en raison même de leur niveau d’éducation pour les premiers et de leur pessimisme pour les seconds, à la fois plus sensibles à la question environnementale et moins enclins à fonder une famille. Par conséquent, l’étude a ensuite pris en compte un large ensemble de potentielles variables confondantes, notamment l’âge, l’éducation, le statut matrimonial, la satisfaction de vivre, l’optimisme et la santé physique.
En définitive, Lockwood et ses coauteurs mettent en évidence un effet très significatif des inquiétudes relatives à l’environnement sur le comportement en matière de fertilité. En effet, une fois que les potentiels facteurs confondants évoqués ci-dessus ont été contrôlés, il apparaît qu’une personne qui ne s’inquiète absolument pas de la question environnementale a environ 60 % de chances en plus d’avoir un enfant relativement aux personnes très soucieuses de la protection de l’environnement.
Références