Entre 2021 et 2023, dans le sillage de la pandémie de Covid-19, l’inflation a atteint des niveaux qu’elle n’avait plus connus depuis plusieurs décennies. Les mesures exceptionnelles adoptées par les autorités monétaires et budgétaires pour faire face à la crise sanitaire en 2020 sont considérées comme l’une des causes, si ce n’est la principale cause, de cette poussée d’inflation. Dans le cas des Etats-Unis, ce sont en particulier les plans massifs de soutien budgétaire des administrations Trump et Biden qui ont été accusés d’avoir alimenté les pressions inflationnistes. La banque centrale américaine, la Réserve fédérale, a également adopté des mesures exceptionnelles lors de la pandémie, en recourant notamment, comme elle l’avait déjà fait dans le sillage de la Grande Récession, à l’assouplissement quantitatif (quantitative easing), c’est-à-dire à d’amples achats de titres de dette.
Jing Cynthia Wu, Yinxi Xie et Ji Zhang (2024) ont cherché à déterminé si les mesures non conventionnelles de politiques monétaire et budgétaire qui ont été adoptées en réponse à la pandémie expliquent l’épisode inflationniste que les Etats-Unis ont connu. Pour ce faire, ils ont utilisé trois méthodes empiriques différentes. Aucune des trois ne valide cette hypothèse.
D’une part, ils se sont appuyés sur des études d’événements pour examiner la réponse des marchés financiers aux relances monétaires et budgétaires durant la Grande Récession et la pandémie de Covid-19. En l’occurrence, ils ont observé le comportement des swaps d’inflation et des titres du Trésor protégés contre l’inflation (TIPS) de différentes échéances. Ils constatent qu’aucun de ces instruments financiers n’a réagi de manière significative aux chocs de politique monétaire.
D’autre part, Wu et ses coauteurs ont réalisé des autorégressions vectorielles (VAR) à partir de données de séries chronologiques pour comparer les effets de la politique monétaire conventionnelle et ceux de la politique non conventionnelle. Ils constatent que la réponse de l’inflation à un choc de politique monétaire est plus faible dans le cas de la politique monétaire non conventionnelle que dans le cas de la politique monétaire conventionnelle. En fait, la réponse de l’inflation à un choc de politique monétaire non conventionnelle est proche de zéro.
En outre, ils ont exploité le fait que le versement des transferts budgétaires n’a pas été le même d’une région à l’autre pour en observer les conséquences sur l’inflation. Ils concluent que cette dernière n’a pas significativement réagi aux transferts.
Les trois économistes ont ensuite cherché à expliquer leurs constats à travers un modèle nouveau keynésien. Ils estiment que si les mesures monétaires et budgétaires exceptionnelles ont pu avoir un effet inflationniste en stimulant la demande globale, celles-ci ont également eu en en parallèle un effet désinflationniste du côté de l’offre globale.
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