La convergence des taux d’activité et des rémunérations entre les hommes et les femmes a eu tendance à ralentir dans les pays de l’OCDE à partir des années 1990. Plusieurs travaux ont souligné l’importance de la maternité pour expliquer la persistance des inégalités de genre sur le marché du travail (Kleven et alii, 2019b ; Meurs et Pora, 2019 ; Berniell et alii, 2021). Certains d’entre eux ont mentionné le rôle des normes de genre dans celles-ci ; par exemple, Kleven et alii (2019a) ont constaté que, parmi les pays développés qu’ils observent, ceux présentant les plus fortes pénalités salariales associées à la maternité tendaient à être ceux présentant les conceptions relatives au genre les plus conservatrices. Mais ces travaux n’ont toutefois pas placé les normes de genre au centre de leur analyse.
mercredi 29 décembre 2021
L’importance des normes de genre dans l’éloignement des mères de l’emploi
mardi 28 décembre 2021
Politique monétaire et crises financières endogènes
L’effet de la politique monétaire sur la stabilité financière est ambigu. D’un côté, une politique monétaire accommodante peut augmenter le risque de crise financière en incitant les sociétés financières à se lancer dans une chasse au rendement, en alimentant la formation de bulles spéculatives et en fragilisant le bilan des agents. Par exemple, la Réserve fédérale est considérée par beaucoup comme responsable de la crise financière de 2007 en ayant maintenu ses taux d’intérêt trop longtemps trop bas entre 2003 et 2005.
jeudi 23 décembre 2021
Dans quelle mesure les ménages augmentent leur épargne en réaction à une relance budgétaire ?
Plusieurs facteurs sont susceptibles de réduire l’efficacité d’une relance budgétaire. L’un d’eux est le comportement « ricardien » prêté aux ménages. En l’occurrence, si l’Etat s’endette pour financer une relance budgétaire, les ménages risquent d’anticiper un accroissement des impôts qu’ils devront payer dans le futur, donc ils risquent de réagir dans la période courante en accroissant leur épargne. La baisse de l’épargne publique est alors en partie, voire totalement, compensée par une hausse de l’épargne privée neutralisant les effets de la relance sur la demande globale. C’est l’idée d’« équivalence ricardienne », développée à partir des années 1970 par le nouveau classique Robert Barro (1974, 1989). Selon ce dernier, la compensation est totale et donc la relance entièrement neutralisée. Mais sa conclusion dépendait de plusieurs hypothèses fortes, notamment celles de ménages à durée de vie infinie et de marchés financiers parfaits.
mercredi 22 décembre 2021
Les justifications données par les banques centrales influencent-elles les effets de leurs achats d'actifs ?
Les effets d’une mesure de politique monétaire diffèrent-ils selon les justifications données par la banque centrale en les adoptant ? Cette question est importante pour la conduite de la politique monétaire. Les banquiers centraux et de nombreux économistes estiment que ses effets transitent notamment, voire même essentiellement, via son impact sur les anticipations ; l’annonce même d’une mesure exercerait des effets en signalant les intentions ultérieures de la banque centrale, sa fonction de réaction (Woodford, 2005 ; Blinder et alii, 2008). Ce canal du signal se révélerait particulièrement important lorsque les taux d’intérêt nominaux sont contraints par leur borne inférieure effective, comme ce fut le cas dans le sillage de la crise financière mondiale : quand la banque centrale ne peut davantage réduire ses taux directeurs, elle peut toujours essayer d’influencer les anticipations pour stimuler davantage l’activité.
samedi 18 décembre 2021
Quelle est l’ampleur de la redistribution en Europe ? A qui bénéficie-t-elle ?
En s’appuyant sur les données tirées de 28 pays européens, Bernhard Hammer, Michael Christl et Silvia De Poli (2021) ont étudié les différences d’un pays européen à l’autre dans l’ampleur et la direction de la redistribution des revenus. Ils observent celle-ci à travers le net benefit ratio, qui mesure la redistribution nette au niveau du ménage en prenant en compte les impôts payés et les revenus de transfert reçus. En observant cet indicateur, Hammer et ses coauteurs notent que la redistribution est relativement élevée dans les pays au sud et à l’ouest de l’Europe et relativement faible au nord et à l’est de l’Europe (cf. graphique).
Comment évolue la dette publique suite à une récession mondiale ?
En 2020, l’économie mondiale a connu la plus forte contraction qu’elle ait subie depuis la Seconde Guerre mondiale. Dans son sillage, les gouvernements ont adopté des mesures de soutien budgétaire sans précédent. Avec la récession et les mesures budgétaires, la dette publique mondiale a connu la plus forte hausse sur une année qu’elle ait connue depuis au minimum 1970. En conséquence, elle a atteint 90 % du PIB, soit le niveau le plus élevé qu’elle ait atteint depuis au minimum un demi-siècle. Dans les pays développés, la dette publique n’avait également pas atteint un niveau aussi élevé (en l’occurrence 123 % du PIB) au cours de ces cinq dernières décennies ; dans les pays en développement, elle a retrouvé un niveau qu’elle n’avait plus atteint depuis 1987 (cf. graphique 1).
mercredi 15 décembre 2021
Quelle est la politique monétaire optimale quand l’économie connaît un choc d’offre temporaire et une inertie de la demande ?
Dans le sillage de la pandémie de Covid-19, l’inflation s’est accélérée ces derniers mois, en particulier aux Etats-Unis. Cette accélération s’explique par un rebond plus rapide de la demande globale que de l’offre globale, entraînant des phénomènes de goulots d’étranglement. Beaucoup, notamment au sein des banques centrales, estiment que l’épisode inflationniste est temporaire, dans la mesure où ils considèrent que les goulots d’étranglement devraient rapidement disparaît. D’autres, peut-être plus nombreux, se montrent plus pessimistes, craignant que les goulots d’étranglement persistent et/ou que ménages et entreprises augmentent fortement leurs anticipations d’inflation, conduisant à un véritablement emballement de l’inflation.
mardi 14 décembre 2021
Comment la guerre commerciale sino-américaine a affecté les échanges mondiaux
Après plusieurs décennies de reflux des barrières à l’échange et notamment de réduction des tarifs douaniers, les deux plus grandes économies au monde, la Chine et les Etats-Unis, se sont affrontées dans une guerre commerciale en 2018 et en 2019. Déclenchée par l’administration Trump, celle-ci s’est faite à coups de hausses de droits de douane : les Etats-Unis ont imposé des droits de douane sur l’équivalent de 350 milliards de dollars d’importations en provenance de Chine, tandis que cette dernière a répliqué en imposant des droits de douane sur l’équivalent de 100 milliards de dollars d’importations en provenance des Etats-Unis.
dimanche 12 décembre 2021
Ecarts de productivité et réallocation des facteurs
La croissance de la productivité semble avoir ralenti dans l’ensemble des pays développés dans les années 2000 (Bergeaud et alii, 2016). Pour expliquer ce phénomène, certains, comme Robert Gordon (2012), ont mis l’accent sur l’essoufflement de l’innovation et, plus largement, sur le ralentissement de la croissance à la frontière technologique. D’autres ont plutôt pointé du doigt une possible dégradation dans l’allocation des facteurs de production en notant que les écarts de productivité entre les entreprises à la frontière technologique et celles qui sont en retard sur celle-ci semblent s’être creusés. Par exemple, certains, comme Dan Andrews et alii (2015) suggèrent que la révolution numérique a permis aux firmes meneuses de consolider leur position dominante dans la mesure où les effets de réseau associés aux technologies d'information et de communication peuvent agir comme barrières à l’entrée et entraîner ainsi des phénomènes à la winner-takes-the-most.
samedi 11 décembre 2021
L’inflation et la hausse du pouvoir de marché des firmes
Par le passé, les récessions tendaient à pousser l’inflation à la baisse, tandis que les reprises tendaient à accélérer l’inflation. Mais dans le sillage de la crise financière mondiale de 2008, l’inflation est restée particulièrement faible et stable malgré d’amples variations de la production et du chômage. Les économistes ont ainsi essayé de comprendre la « déflation manquante » de la Grande Récession et l’« inflation manquante » de la reprise qui l’a suivie.
mercredi 8 décembre 2021
Anatomie de la mobilité intergénérationnelle du revenu en France
En s’appuyant sur les données administratives, Gustave Kenedi et Louis Sirugue (2021) ont fourni de nouvelles estimations de la mobilité intergénérationnelle de revenu en France pour les personnes nées dans les années 1970.
mardi 7 décembre 2021
Pourquoi peu d’économistes travaillent sur le changement climatique ?
Le changement climatique est considéré comme l’un des problèmes les plus importants, si ce n'est el plus important, auquel l’humanité fait actuellement face. Plusieurs études suggèrent notamment qu’il provoquera d’importants dommages économiques, que les mesures adoptées pour le freiner sont elles-mêmes susceptibles de pénaliser l'activité économique, du moins à court terme, etc.
Les économistes ont donc a priori toutes les raisons de s'y intéresser. Pourtant, ils sont relativement peu à travailler sur le sujet. Selon Andrew Oswald et Nicholas Stern (2019), qui notent le très faible nombre d’articles portant sur le thème du changement climatique dans les revues les plus prestigieuses, la science économique serait piégée dans un véritable « équilibre de Nash sous-optimal » : chaque économiste serait peu incité à travailler sur ce thème précisément parce que les autres économistes ne travaillent pas dessus. En l’occurrence, les économistes délaisseraient la question du changement climatique parce qu’ils penseraient qu’ils ont peu de chances de voir un article traitant de ce thème être publié par une revue prestigieuse.
lundi 6 décembre 2021
Quelle a été la taille des multiplicateurs budgétaires au cours de la récession pandémique ?
En réponse à la puissante contraction de l’activité économique provoquée par la pandémie de Covid-19, les gouvernements ont fortement assoupli leur politique budgétaire. L’adoption d’une politique budgétaire contracyclique est effectivement préconisée dans le cas des récessions typiques, dans la mesure où les multiplicateurs budgétaires y apparaissent élevés : d’une part, il y a des capacités de production inutilisées, si bien que l’offre est alors susceptible de répondre plus vite à une hausse de la demande ; d’autre part, les récessions sont souvent associées à un resserrement des conditions de crédit, si bien que la consommation devient alors plus sensible au revenu et que les propensions marginales à consommer sont alors élevées.
dimanche 5 décembre 2021
Quel a été l’impact du télétravail sur le bien-être individuel pendant les confinements ?
L’un des plus probables héritages à long terme de la pandémie de Covid-19 pourrait être un recours plus fréquent télétravail. Dans les pays de l’OCDE, ce dernier ne concernait qu’une infime partie des travailleurs, en l’occurrence entre 3 et 5 % d’entre eux, avant qu’apparaisse le coronavirus. Mais au printemps 2020, dans la plupart des pays, les autorités ont appelé les travailleurs à travailler un maximum à partir du domicile pour réduire les déplacements et freiner ainsi la propagation de l’épidémie. Au Royaume-Uni, par exemple, un tiers des travailleurs occupés ont ainsi brutalement basculé dans le télétravail. Le maintien d’un recours plus massif au télétravail au sortir de la pandémie dépendra, du côté de la demande de travail, de son impact sur la productivité et, du côté de l’offre de travail, de son impact sur le bien-être des travailleurs (Barrero et alii, 2021).
samedi 4 décembre 2021
Les transitions démographiques dans le temps et dans l’espace
Avant que s’amorce la transition démographique, un pays connaît généralement des taux de natalité et de mortalité élevés. La transition démographique commence typiquement quand le taux de mortalité diminue. En conséquence, la croissance démographique s’accélère : la population augmente vite. Ensuite, quelques décennies après, le taux de natalité diminue à son tour, ce qui tend à ralentir la croissance démographique. La transition démographique s’arrête quand le taux de natalité rejoint le taux de mortalité à un faible niveau.
jeudi 2 décembre 2021
La borne inférieure zéro… sur les anticipations d’inflation
La Grande Dépression des années 1930 et plus récemment la stagnation japonaise ont amené beaucoup d’économistes et de banquiers centraux à s’inquiéter d’une éventuelle déflation : la baisse des prix pénaliserait l’activité économique, par exemple en amenant les agents à retarder leurs achats de biens durables ou en accroissant le fardeau de leur dette. C’est notamment la perspective d’une déflation qui a poussé les banques centrales à fortement assouplir leur politique monétaire et notamment à recours à des mesures non conventionnelles comme le forward guidance lors de la crise financière mondiale et, plus récemment, lors de la pandémie de Covid-19. Les modèles à anticipations rationnelles tendent à justifier une telle réaction des autorités monétaires.
mercredi 1 décembre 2021
Etats-Unis : le reflux du chômage pandémique au regard des précédentes reprises
Au cours des dix reprises de l’emploi observées au cours de la période allant de 1949 à 2019, le taux de chômage a eu tendance à baisser régulièrement aux Etats-Unis. En l’occurrence, lors de ces épisodes de reprise observés après 1960, le chômage a eu tendance à refluer au rythme de 10 % par an (cf. graphique 1). Cette observation est d’autant plus surprenante que les hausses initiales du chômage n’ont jamais été provoquées par le même choc : par exemple, la récession de 1981 avait été provoquée par le resserrement de la politique monétaire américaine, tandis que la Grande Récession de 2007 a résulté de l’éclatement d’une bulle immobilière et d’une crise financière. Cette régularité historique a amené Robert Hall et Marianna Kudlyak (2021a) à qualifier d’« inexorables » les reprises de l’emploi aux Etats-Unis.