La question de la qualité de l’emploi est importante, d’une part, pour les travailleurs qui les occupent, dans la mesure où elle influence leur intégration sociale et joue directement sur leur bien-être et, d’autre part, pour les entreprises, dans la mesure où elle influence la productivité des travailleurs et le risque qu’ils démissionnent. Bien-être et productivité ne sont en effet pas antinomiques : les entreprises ont les salariés sont les plus heureux tendent à être plus productives (Krekel et al., 2019).
Il y a plusieurs façons de mesurer la qualité de l’emploi. Une première approche, assez objective, consiste à calculer un indice prenant en compte plusieurs caractéristiques de l’emploi, par exemple le niveau de salaire, la sécurité de l’emploi, les conditions de travail, les opportunités de promotion, l’autonomie, l’articulation entre vie privée et vie professionnelle, etc. Une autre approche, plus subjective, consiste à s’appuyer sur un unique indicateur de la qualité de l’emploi telle qu’elle est perçue par les travailleurs, souvent la satisfaction globale vis-à-vis du travail.
La littérature autour de la satisfaction de l’emploi a suggéré plusieurs tendances : la satisfaction de l’emploi tend à augmenter avec le revenu, à baisser avec le nombre d’heures travaillées et à suivre une évolution en forme de U en fonction de l’âge.
Dans une nouvelle étude, Andrew Clark et Michal Kozák (2023) ont observé l’évolution de la qualité de l’emploi entre le milieu des années 1990 et le milieu des années 2010 dans treize pays de l’OCDE en s’appuyant sur des vagues de l’enquête ISSP. Pour cela, ils ont mesuré la qualité de l’emploi avec, d’une part, plusieurs caractéristiques spécifiques de l’emploi et, d’autre part, un score de satisfaction globale vis-à-vis du travail.
Pour ce qui est valorisé dans un emploi, Clark et Kozák estiment que les différences entre femmes et hommes apparaissent mineures et que les caractéristiques valorisées sont assez stables au cours du temps. Les aspects de l’emploi que les femmes, aussi bien que les hommes, considèrent comme les plus importants au cours de toutes les années sont la sécurité de l’emploi et l’intérêt du travail, puis l’autonomie dans une moindre mesure. A l’opposé, la rémunération et le nombre d’heures travaillées sont parmi les caractéristiques du travail considérées comme les moins importantes.
L’évolution de plusieurs caractéristiques de l’emploi suggère une amélioration de la qualité de l’emploi. En l’occurrence, la proportion de travailleurs estimant que leur rémunération est élevée a augmenté, tout comme la proportion de travailleurs déclarant bénéficier de bonnes opportunités de promotion, d'une sécurité de l’emploi et d'un bon contenu du travail. En outre, une part croissante des salariés désire vouloir passer plus de temps au travail. En revanche, la proportion de travailleurs déclarant avoir un travail stressant et un travail difficile augmente, ce qui va conforte l’idée d’une intensification du travail (Askenazy, 2004). En définitive, Clark et Kozák estiment que les évolutions positives semblent avoir plus que compensé les évolutions négatives, dans la mesure où la proportion de travailleurs déclarant tirer une forte satisfaction de leur emploi a augmenté au cours des deux décennies observées : la satisfaction de l’emploi s’est améliorée entre 1997 et 2005 et son amélioration s’est poursuivie jusqu’en 2015, et ce malgré l’éclatement de la Grande Récession en 2008.
Cela dit, l’amélioration de la satisfaction de l’emploi globale peut dissimuler une hausse des écarts de satisfaction. Clark et Kozák notent qu’en général, parmi les treize pays qu’ils observent, les inégalités de satisfaction se sont certes creusées, mais faiblement.
Références
ASKENAZY, Philippe (2004), Les Désordres du travail. Enquête sur le nouveau productivisme, Le Seuil.